Avec "Holy Motors", le réalisateur français propose le film le plus fascinant et le plus délirant de la compétition. Son acteur fétiche Denis Lavant est entouré d'Eva Mendes et de Kylie Minogue.
Cinéaste maudit, Leos Carax n’est pas précisément un auteur prolifique. Cinq films seulement tournés en 28 ans, si l’on excepte "Tokyo", notamment co-réalisé avec Michel Gondry. C’est dire si treize ans après "Pola X" honni par la critique, son retour en concours sur la Croisette était attendu avec impatience.
Le réalisateur n’a pas déçu les attentes des cinéphiles, débarquant avec un véritable ovni sous le bras. Où il suit dans sa folle journée Monsieur Oscar, personnage protéiforme à la recherche de lui-même, de la vie, de l’action.
Il apparaît ainsi tour à tour en banquier, en vieille mendiante gitane, en ouvrier spécialisé de la Motion Capture pour un fabuleux et inoubliable coït, en immonde Monsieur Merde, en improbable père de famille, en accordéoniste, en tueur, en tué, en mourant peu pressé de passer l’arme à gauche et en homme au foyer pour le moins singulier.
Voyageant de vie en vie, Monsieur Oscar est l’unique passager d’une immense limousine blanche. Aux commandes du véhicule se trouve Céline, longue, élégante et impeccable dame blonde, qui conduit l’homme dans Paris et ses environs.
Soigneusement posés sur le siège à côté de lui, dix contrats qu’il va respecter, tel un consciencieux tueur à gages. Travaillant pour la beauté du geste, il est forcé de se montrer aussi inventif que créatif à chaque fois.
Complice de toujours de Leos Carax, c’est évidemment Denis Lavant qui se plonge avec un rare talent dans ces divers personnages. Il est notamment entouré d’Eva Mendes et de Kylie Minogue, dont le rôle devait au départ être tenu par Kate Moss.
La chanteuse australienne s’est déclarée absolument ravie et fière de faire partie de l’équipe. On le serait à moins. Surréaliste, magnifique, surprenant, dingue, riche, étrange, "Holy Motors", qui va jusqu’à faire parler les machines comme des humains, est sans aucun doute le film le plus fascinant et le plus délirant montré jusqu’ici. Il nous transporte carrément dans une autre dimension.
Hit The Road Jack
On retombe lourdement sur terre avec "On The Road" de Walter Salles, adapté du célèbre roman de Kerouac. Apprenti écrivain new-yorkais, Sal Paradise rencontre Dean Moriarty, un jeune ex-taulard coureur de jupons au charme ravageur, marié à la jolie Marylou, un esprit libre avide d’expériences.
Décidés à quitter leur vie étriquée, tous trois partent sur les routes à la découverte du monde entre frénésie de drogue, d’alcool et de sexe. Sauf qu’on en croit pas une seconde à l’histoire, tant les personnages sont beaux, clean et pas le moins du monde marqués par une existence de vagabondage et de débauche. A commencer par Kristen Stewart, la virginale héroïne de Twilight, promise à ce rôle depuis ses seize ans. Belle erreur de casting.
Ken Loach ou la rédemption par le whisky
Heureuse surprise du cinéaste britannique qui avait beaucoup déçu lors de sa dernière sélection cannoise. Avec "La part des anges", met joyeusement en scène une bande de délinquants, dont le jeune Robbie, qui découvrent l’art du whisky grâce aux travaux d’intérêt général auxquels ils ont été condamnés.
Sous la houlette de l’éducateur, maître es-pur malt, ils passent secrètement de distilleries en séances de dégustation hyper classieuses. Robbie se découvre alors un réel talent dans le domaine, parvenant à identifier les cuvées les plus exceptionnelles. Du coup, ça travaille sec dans sa petite tête…
Ken Loach a déniché un inconnu, Paul Brannigan, pour jouer Robbie. Il est parfait dans cette comédie sociale pleine d’humour, farfelue, tendre et caustique. En un mot jubilatoire, même si on ne la retrouvera certainement pas au palmarès.