Ridley Scott, qui a marqué l’histoire du cinéma avec les inoubliables Alien, Blade Runner, ou Thelma et Louise, ajoutait, il y a vingt-quatre ans, une œuvre culte, Gladiator, exaltant le courage et la fidélité. Tout en redonnant ses lettres de noblesse au peplum, l’opus engrangeait alors 450 millions de dollars au box office et raflait au passage cinq Oscars dont celui de meilleur film et de meilleur acteur.
Aujourd’hui, le réalisateur de 86 ans peu épargné pour House Of Gucci (2021) et carrément malmené par la critique en 2023 pour Napoléon en 2023 tente de se refaire une beauté en proposant une suite à son célèbre belluaire. Elle se situe seize ans après la mort de Maximus (Russel Crowe), gladiateur vénéré par la foule et de l’empereur Commode (Joaquin Phoenix) dans l’arène du Colisée, et s’attache au destin d’Hanno (Paul Mescal), un Romain promu à une haute fonction après avoir été adopté par le peuple numide lorsqu’il était enfant et s’appelait Lucius.
Après la conquête de sa nation libre par le puissant général romain Acacius (Pedro Pascal), responsable de la mort horrible de sa femme et de son fils, Hanno, est fait prisonnier, est emmené comme esclave à Rome. Rempli de haine et de rage, il attire rapidement l’attention du richissime cynique et ambitieux Macrinus (Denzel Washigton), marchand d’armes et commanditaire des gladiateurs, qui vise le Sénat.
Panem et circences. Rome n’a hélas pas changé, jetant toujours ses gladiateurs en pâture pour plaire la plèbe. .C’est donc dans le sable du Colisée que le valeureux Hanno devra sauver sa vie, gagner sa liberté. Mais on s’en doute, il va marcher avec panache sur les traces du glorieux Maximus. Electrisant le public non seulement en remportant tous ses combats, luttant quasiment à mains nues contre des hommes bardés de fer ou des animaux féroces, mais en offensant Geta et Caracalla, les décadents, tyranniques et sanguinaires frères empereurs, plus crétins l’un que l’autre, et haïs du public.
Ivre de vengeance, il n’en oublie pas pour autant Acacius. Dans la foulée, la femme de ce dernier Lucilla (Connie Nielson), découvre qui est en réalité Hanno... Sur qui repose la lourde tâche de restaurer la grandeur de Rome et de rendre la ville à son peuple. « Make Rome Great Again, » comme dirait un certain Donald Trump. Sauf qu’Hanno ne pense pas à sa gloire personnelle…
La vérité historique, il s’en tamponne, Scott
A quelques détails près, cette deuxième mouture tournée au Maroc ressemble fort à un remake qui, depuis l’annonce du projet, aura mis six ans à s’étaler sur grand écran. Et comme tous les remakes ou presque, il est nettement moins bon que l’original. Pour l’anecdote, l’auteur se montre toujours aussi peu scrupuleux envers la vérité historique. Par exemple Lucilla ayant été assassinée sur l’ordre de son frère Commode après qu’il a abusé d’elle, ne devrait pas être là. Le cinéaste a aussi une notion improbable de la gémellité et oublie que c’est Caracalla qui a tué Geta et non l’inverse, comme il le montre.
Mais Scott s’en tamponne. Et en réalité, ce n’est pas le plus ennuyeux. En mal d’ambition artistique et de créativité, Ridley Scott tente de compenser en nous en mettant plein la vue. Misant sur le monumental et la surenchère, mettant plus particulièrement l’accent sur la violence de combats acharnés où le sang de corps mutilés pisse en abondance partout. Qu'li s'agisse d'une bataille navale dans un Colisée rempli d’eau où rôdent de sinistres requins assoiffés d'hémoglobine, d'un terrifiant affrontement avec d’affreux babouins géants en 3D, ou d'une lutte sans merci avec un rhinocéros furax, avide d’empaler ses adversaires de sa corne redoutable.
La vraie star c’est Denzel Washington
Reste le casting. Tête d’affiche, l’acteur irlandais Paul Mescal, révélé par la série Normal People, surprend par sa fadeur. Il n’a pas le charisme de Russel Crowe. Tout comme Pedro Pascal n’a pas celui de Joaquin Phoenix. Tous deux se font voler la vedette par Denzel Washington, parfait en machiavélique, impressionnant, excessif, complexe, ambigu, cruel et dominateur Macrinus. Un vrai bad guy. On relèvera également Connie Nielson dans le rôle de Lucilla, femme de pouvoir, mais sur le qui vive car constamment menacée de mort par l’affreux Caracalla.
Mais si on chipote sur ce deuxième volet, peut-être que Ridley Scott nous séduira par une troisième mouture. En tout cas, il a fait savoir qu'il était partant et a déjà est partant et a déjà des idée, a-t-il fait savoirs. savoir. C’est tout ce qu’on souhaite: Make Scott Great Again…
"Gladiator 2", à l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 13 janvier.