Grand écran: "Les enfants vont bien", émouvant mélo familial porté par Camille Cottin. Rencontre avec le réalisateur Nathan Ambrosioni (02/12/2025)

C’est l’été. Suzanne  (Julie Armanet), accompagnée de ses deux jeunes enfants, débarque à l’improviste chez sa sœur Jeanne (Camille Cottin). Celle-ci est totalement prise au dépourvu. Non seulement elles ne se sont pas vues depuis plusieurs mois mais Suzanne se comporte bizarrement. Elle paraît détachés, absente. Le lendemain matin, elle n’est plus là. Mais elle a laissé une lettre dans laquelle elle explique qu’elle a décidé de… disparaître!
 
Sidérée, Jeanne se rend à a la gendarmerie, mais on lui apprend qu’aucune procédure de recherche ne pourra être engagée, Suzanne ayant volontairement et librement fait son choix, et donc exercé son droit à l’oubli. Célibataire, absorbée par son boulot, dépourvue de la moindre fibre maternelle, Jeanne se retrouve d’un coup avec deux neveux à charge, dans une situation a priori ingérable. C’est la panique, les questions qui se bousculent. Pourquoi sa sœur a-t-elle fait ce choix insensé ? Le pouvait-elle vraiment? Pourquoi lui avoir confié ses gosses, à elle qui n’en voulait pas? Envisage t-elle de revenir?  La police n’a-t-elle réellement aucun moyen d’intervenir?  
 
La famille est un thème que le jeune réalisateur Nathan Ambrosioni avait déjà traité en 2023,  également en compagnie de Camille Cottin, dans Toni en famille. La, il observe le bouleversement brutal dans la vie de son héroïne soudain complètement déstabilisée, qui se demande comment elle va désormais pouvoir s’en sortir dans un quotidien chamboulé.

Excellente Camille Cottin

Tout en jonglant avec divers sujets complexes, sororité, maternité, intimité, passé familial, l’auteur propose paradoxalement un film simple, délicat, sensible, réaliste, porté par une excellente Camille Cottin dans un rôle écrit pour elle. Le cinéaste qui avoue avoir eu la chance qu'elle accepte, alterne les points de vue: ressenti de son personnage et regard des enfants. On est par ailleurs dans un drame inversé, .le récit commençant par le pire pour aller vers la lumière, la réparation. La vie qui avance.

A seulement 25 ans, Nathan Ambrosioni signe son troisième film. Logique selon ses dires, lors d’une rencontre à Genève: «J’adore le cinéma et je ne sais faire que ça. Depuis l’âge de 12 ans, je mange, je dors, je me réveille, je pense cinéma. Il m’habite littéralement». 
 
Petite précision. En français le film s’intitule Les enfants vont bien et en anglais Out Of Love. Quelle est la raison de cette différence? 
 
En ce qui concerne l’anglais, c’est une idée de nos distributeurs. Le titre est ambigu car il peut signifier Sans amour ou Par amour. En français, il y a un contre-sens assez ironique, dans la mesure où ,dans le fond, Les enfants ne vont peut-être pas aussi bien que ça…
 
D’où vous est venu cet intérêt pour les disparitions volontaires?
 
 D’un article paru en 2019, où une mère évoquait celle de son fils adulte. .Je ne cessais d’y penser, je voulais comprendre. Je trouvais cet acte terrible pour une mère. De surcroît, ma sœur est partie cette même année en Nouvelle-Zélande et n’est pas revenue. Je n’ai pas tout de suite fait le lien entre ces deux événements, mais petit à petit, j’ai eu envie de me pencher à nouveau sur la famille. Enfin il faut savoir qu’en France  il y a 15000 personnes par an qui s’évanouissent ans la nature. Un phénomène en soi suffisamment intrigant.

Vous avez fait beaucoup de recherches. Est-ce vrai que la police ne peut pas enquêter sur ces affaires?
 
Oui, pendant deux mois Je me suis entretenu avec des policiers des psychiatres. J’ai appris beaucoup de choses.  Ce qui m‘a frappé, c’est l’humanité de ces gens, au-delà des lois. Ils se sentent concernés, impliqués. C’est fort. Le film devait le montrer. Tout comme le droit à l’oubli, qui empêche effectivement d’ouvrir des enquêtes.

Pourquoi avez-vous ajouté l’abandon d’enfants?
 
Un scénario  c’est comme un personnage. IL faut bien le nourrir pour le faire mieux exister. Je prends toujours énormément de notes avant d’écrire. A un dîner, lors d’une rencontre, au travail. J’avais envie de raconter le rapport de ces femmes à la maternité, explorer ce lien, déconstruire certains schémas en évoquant notamment le fait qu’on accepte toujours mal qu’une femme ne veuille pas procréer. Cela pose des questions morales.
 
 Puisqu’on parle d’enfants, était-ce difficile de travailler avec eux ?
 
Non, j’ai adoré. Ils étaient très investis.  En même temps il fallait évidemment les protéger, éviter de les traumatiser car il s’agit d’un film dur. On a procédé comme pour un jeu, mais très concret, de sorte que tout reste crédible.

On devrait bientôt retrouver Nathan Ambrosioni, qui n’a pas attendu pour se remettre à l’écriture et qui mitonne cette fois un film d’horreur. «Ado, j’en ai réalisé des petits. J’aime me faire peur». 

«Les enfants vont bien», à l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 3 décembre. 

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