Grand écran: "Naître Svetlana Staline", le parcours hors norme de "la princesse du Kremlin" (20/11/2024)
Fille unique de Joseph Staline et de Nadejda Allilouïeva, Svetlana, qui a vu le jour en 1926, a eu une existence complexe, hors du commun. A travers des archives rares et des images animées, le réalisateur suisse Gabriel Tejedor brosse le portrait d’une femme libre, qui essaie de prendre le contrôle de sa vie et d’échapper à l’ombre sanglante de son père. S’inscrivant dans le contexte politique, social et idéologique de l’époque, l’auteur met au jour un chapitre méconnu, en racontant le parcours fascinant d’un personnage excessif, exalté, émouvant, déchiré entre sa redoutable filiation, son éducation, sa responsabilité maternelle et ses propres ambitions.
Adorée de son père, qui la chouchoutait et s’amusait à obéir à ses ordres de gamine, Svetlana mène une vie insouciante au Kremlin jusqu’à la mort de sa mère, qui se suicide six ans plus tard. Son monde commence à changer. Petit à petit, elle voit ses proches disparaître. Par ailleurs l’impitoyable Staline a l’amour tyrannique. Il a aussi du mal à accepter de la voir grandir. Il exige qu’elle se comporte et s’habille modestement, en cachant ses coudes et ses genoux.
Des compagnons pour provoquer son père
Elle fait mine de céder, mais sort faire la bringue avec son frère et, à 16 ans, tombe amoureuse d’Alexis Kapler, comédien juif, son aîné de 38 ans. Furieux, Staline la gifle, l’oblige à rompre ses fiançailles et Kapler est condamné à dix ans de goulag. Dès lors le fossé s’élargit entre le père et la fille qui choisira ses futurs compagnons pour le provoquer. Et tout bascule lors de la mort du dictateur, responsable de millions de morts, en 1953.
Svetlana est désormais sous haute surveillance. Elle fréquente les intellectuels et les dissidents. abandonne le nom de Staline pour celui de sa mère, Allilouïeva, se convertit à la religion orthodoxe, et commence à écrire son autobiographie pour se libérer l’esprit. Mariée et divorcée deux fois, alors mère d’un garçon et d’une fille, elle entame en 1963 une liaison avec Brajesh Singh, membre du PC indien qu’on lui interdit d’épouser. Toutefois à sa mort en 1966 , elle est autorisée à rapporter ses cendres en Inde. Elle profite alors de ce séjour pour réclamer l’asile à l’ambassade des Etats-Unis à New Dehli, abandonnant ainsi ses deux enfants. Sa fille Katia ne le lui pardonnera pas.
Traquée jusqu’à sa mort
Mais on est en pleine guerre froide. A Genève ont lieu es discussions sur la signature d’un traité de désarmement nucléaire entre les États-Unis et l’URSS ont lieu à ce moment-là à Genève ! On craint que le passage de la fille de Staline à l’Ouest ne compromette tout rapprochement entre les deux blocs,, comme le montre le documentaire. Tandis que les Soviétiques manifestent leur colère, le président Lyndon Johnson embarrassé préfère d’abord la cacher en Suisse, à Fribourg, chez les religieuses. Elle devient la cible des reporters qui la traqueront sans relâche jusqu’à sa mort, à l'instar des services secrets et ses fans.
Après ce séjour en Suisse, ce sont des années d’errance pour Svetlana. Elle se remarie, donne naissance à une petite Olga, divorce, ne cesse de déménager, prend la nationalité américaine, publie ses souvenirs où elle qualifie son père de monstre. Elle retourne en URSS en 1984, mais, déçue, retrouve un pays au bord de la faillite, un parti qui veut l’instrumentaliser et des enfants à qui elle n’a jamais manqué. Elle décide alors de s'installer à Londres Au départ crainte et admirée, mais prisonnière politique de son père, «la princesse du Kremlin» finira tristement ses jours dans le Wisconsin, en novembre 2011.
A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 20 novembre.
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