Festival de Cannes; Quentin Dupieux brouille la frontière entre fiction et réalité dans "Le deuxième acte" (15/05/2024)

A l’heure des polémiques, accusations et autres revendications, il était plus que judicieux de choisir Le deuxième acte de l’hyperactif Quentin Dupieux, pour ouvrir la 77e édition du Festival de Cannes. 

Un film qui se fait  et un film sur un film qui se fait...Alors le réalisateur s’interroge sur la capacité du cinéma à continuer à nous émerveiller à nous faire rêver, son nouveau long métrage  (plutôt court d‘ailleurs avec ses 80 minutes), évoque  raconte le tournage difficile et ingrat pour quatre acteurs (Léa Seydoux, Vincent Lindon, Louis Garrel et Raphaël Quenard) d’un navet indépendant  aux dialogues indigents

D’une telle médiocrité que les personnages ne cessent de  sortir de leur rôle pour se plaindre et révéler et de révéler leur vraie nature. A l'image de Vincent Lindon, pour qui c’est le chaos dans son métier, qui en a marre et n’en peut plus de ces fictions à la con , tandis que le monde est en train de couler. Ce qui ne l’empêchera pas  de tourner rapidement sa veste lorsqu’il qu’il se voit proposer de jouer dans  le prochain film du réalisateur américain Paul Thomas Anderson. 

Mise en abyme le plus souvent jubilatoire pour cette satire du cinéma actuel , dont le cinéaste se plaît à relever l’importance relative face aux tragédies mondiales,  voire, ne servant à rien,. Quentin  Dupieux se moque de tout. Plus particulièrement du wokisme et de ses outrances, ce qui nous vaut une première scène absolument irrésistible entre Louis Garrel qui redoute la cancel culture et Raphaël Quenard qui dit tout ce qui lui passe par la tête sans réfléchir aux conséquences. Savoureuse aussi la séquence où ce dernier tente d’embrasser Léa Seydoux et qu’elle lui balance qu’elle peut le griller pour ça, si elle le raconte à la presse.

Une performance technique

Le reste n’est pas toujours à la hauteur dans cet opus qui, juste en passant, compte  le travelling le plus long du cinéma. Mais au-delà de cette performance technique, on peut reprocher à son auteur de noyer en quelque sorte le poisson avec sa façon maligne, paradoxale, absurde et un peu facile de procéder, sans véritablement creuser les grands sujets qui agitent le milieu. 

On est aussi un peu déçu par une série de vannes pas très fines, une nouvelle technique de drague consistant à philosopher sur la fiction qui est la réalité ou  l’inverse, sans oublier le passage grossièrement expédié sur l’intelligence artificielle qui pilote l’œuvre.

Il aurait été intéressant dentendre l’auteur. Mais, refusant  toute promotion et toute interview, Quentin Dupieux laisse Le deuxième acte parler pour lui.  « Aujourd’hui j’ai envie de me taire a.t.il déclaré Non par lassitude ou prétention mais simplement parce que ce film très bavard dit avec des mots bien choisis tout ce que j’ai envie de dire et contient  déjà de façon extrêmement limpide sa propre analyse.» Dont acte.

A l'affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 15 mai.

 

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