FIFF de Namur: polar remarquable, "Roubaix, une lumière" décroche le Bayard d'Or (05/10/2019)
Il avait été ignoré par le jury cannois en mai dernier. Sous la présidence d’André Téchiné, celui du FIFF (Festival international du film francophone) dont la 34e édition vient de se tenir à Namur, a réparé cette incompréhensible oubli. Il a en effet décerné on ne peut plus logiquement son Bayard d’Or du meilleur long-métrage en compétition officielle à Roubaix, une lumière, d’Arnaud Desplechin.
C’est la première fois que le fer de lance du cinéma d’auteur français s’attaque au polar. Il livre avec Roubaix, une lumière, un film noir, métaphysique, singulier, sublimé par le face-à-face entre Roschdy Zem, Léa Seydoux et Sara Forestier. Les trois se révèlent impressionnants dans cette affaire à la Simenon, à la fois sinistre et banale. Plus particulièrement Roshdy Zem, qui compose un policier taiseux tenant à la fois du prêtre, de l’assistant social et du psychanalyste. (Voir aussi notre critique du 20 août dernier)
Le Bayard de la meilleure interprétation est revenu à Fantine Harduin et Thomas Gioria pour leurs rôles dans le film Adoration de Fabrice Du Welz, qui avait eu en août dernier les honneurs de la célèbre Piazza Grande tessinoise. Paul, un jeune garçon solitaire, rencontre Gloria, la nouvelle patiente de la clinique psychiatrique où travaille sa mère. Tombé amoureux fou Paul va s’enfuir avec elle, loin du monde des adultes.
Le Prix du meilleur scénario a été attribué à Boris Lojkine et Bojina. Panayotova pour Camille. Cette histoire vraie évoque avec émotion le destin de Camille Lepage (Nina Meurisse, photo), jeune photojournaliste partie en Centrafrique couvrir la guerre civile qui se prépare. Egalement projeté à Locarno, il avait remporté le prix du public.
Virginie Surdej a décroché le prix de la meilleure photographie pour By the Name of Tania de Bénédicte Liénard et Mary Jiménez. Qui se penchent sur les horreurs vécues par une adolescente péruvienne, forcée de devenir une esclave sexuelle. Cet opus a été également récompensé d’un prix spécial, tandis que la Québécoise Myriam Verreault a reçu une mention spéciale pour Kuessipan. Elle propose une vision réalistico-poétique, aussi originale qu’intéressante, de la jeunesse innue d’Uashat, une réserve de la Côte-Nord.
Dans la compétition Première oeuvre de fiction, on est moins séduit par le choix du jury Emile Cantillon (composé de cinq étudiants en cinéma âgés de 18 à 25 ans) qui a récompensé Perdrix, une comédie loufoque d’Erwan Le Duc. En revanche Mamadou Dia mérite bien à notre avis le Prix découverte pour son premier long métrage Le père de Nafi. Il imagine une petite ville du Nord du Sénégal qui tombe peu à peu dans l’extrémisme religieux.
On signalera encore parmi les nombreux autres prix, Lola vers la mer du Belge Laurent Micheli, qui livre un film bouleversant sur la transidentité à travers l’affrontement douloureux d’une adolescente et d’un père brisé par la mort de sa femme.
S’obstinant à l’appeler Lionel, son nom de garçon, il la rejette, n’acceptant ni ne comprenant la transition. L'auteur crée ainsi une situation familiale diamétralement opposée à celle du fameux Girl de Lukas Dhont.
Le rôle principal de Lola est interprété par la jeune transgenre Mya Bollaers (photo), une révélation. Elle donne la réplique à un très convaincant Benoît Magimel, qu’on retrouve avec un vrai plaisir.
Avec sa programmation variée de 139 longs et de courts métrages, beaucoup d’œuvres à sujet reflétant la vie et ses problèmes, d’opus engagés, inédits, poétiques, drôles, inédits ou vus dans d'autres festivals, le FIFF a rempli sa mission dans ce cru 2019, en présence de 250 invités et de 340 journalistes: rendre compte une nouvelle fois de la diversité du cinéma.
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