Festival de Locarno: la Piazza Grande entre enfance, procès et catastrophe aérienne (09/08/2019)
Annoncée, la pluie menaçait de gâcher les projections sur la très convoitée Piazza Grande, Mais suite à des débordements torrentiels, le ciel se faisait plus clément et permettait mercredi soir, l’ouverture du festival sous les étoiles avec Magari, premier long-métrage de la réalisatrice italienne Ginevra Elkann.
Une présentation entre les gouttes qui avait de quoi combler la nouvelle directrice Lili Hinstin à la tête de la 72e édition, qui a privilégié sa propre approche sur la fameuse place en laissant se succéder cinéma d’auteur et grand public.
Ginevra Elkann, petite-fille du grand Gianni Agnelli, retrace l’enfance, dans les années 80, de deux frères et une sœur, enfants de parents divorcés qui vivent à Paris avec leur mère (Céline Sallette). Fatiguée par une quatrième grossesse, elle les envoie passer Noël en Italie chez leur père Carlo (Riccardo Scamario), un séducteur qui remanie inlassablement son scénario dont le producteur ne veut pas, en compagnie de son amie du moment Benedetta (Alba Rohrwacher)
Alma, 9 ans, jean, 12 ans et Sebastien 14 ans, unis par le même désir d’être une famille, débarquent ainsi à Rome en tenue de ski. Mais au lieu de les emmener à la neige comme prévu Carlo, plutôt fauché, les embarque dans une villa au bord de mer. Et voici la smala partie pour une bien étrange semaine de vacances, où les tensions remontent.
Entre non-dits et futur incertain idéalisé
Avec ses comédiens rompus au jeu qui se confrontent à trois débutants, la réalisatrice analyse des non-dits, une difficulté à communiquer, un futur incertain idéalisé. Tout en observant avec finesse les états d’âme de ses protagonistes, elle livre une oeuvre pleine de grâce, de douceur, d’émotion et de poésie où se mêlent les différences de langues, de culture, de religion.
En fait partie le titre Magari (Si seulement en français), illustrant l’espoir que les parents redeviennent un couple. Un mot très éloquent qui n’existe qu’en italien, évoquant à la fois le bonheur, la mélancolie, le désir.
La fille au bracelet
Le Français Stéphane Demoustier a lui aussi profité de la bienveillance céleste pour La fille au bracelet. Lise, 18 ans, vit dans un quartier résidentiel sans histoire et vient d'avoir son bac. Mais depuis deux ans, elle porte un bracelet car elle est accusée d'avoir assassiné sa meilleure amie. Le film s’inspire du scénario d’Acusada un film dramatique argentin de Gonzalo Tobal réalisé à partir d’un fait divers, en compétition à la dernière Mostra et sorti en 2018.
La comparaison s’arrête là. Au spectaculaire et aux effets de manches, Stephane Demoustier privilégie l’épure, les joutes verbales en forme de duels, tout en faisant du spectateur un juré. Par ailleurs, contrairement à son collègue sud-américain, il adopte le point de vue de ceux qui entourent l’accusé et ses proches. Dans ce film à procès, en gros celui de la jeunesse et du fossé des générations où la vie secrète de Lise est dévoilée, on tente de discerner ou non la révélation d’une vérité.
En dépit de quelques incohérences scénaristiques, les comédiens portent bien le film. Pour incarner l’adolescente, Stéphane Demoustier a choisi la jeune Mélissa Guers, à la fois intense, mystérieuse et mutique. Ses parents sont incarnés par Roschdy Zem (qui ne cesse de se bonifier) et Chiara Mastroianni. La sœur du réalisateur, Anaïs Demoustier, au jeu un rien raide, a elle enfilé le costume de l’avocat général.
7500, tous dans le cockpit
L’Allemand Patrick Vollrath, à son tour béni des cieux, a tenté la catastrophe dans 7500, son premier long métrage et nous enferme, claustrophobes s’abstenir, dans l'étroit cockpit d’un Airbus A319 avec le copilote Tobias Ellis, alias Joseph Gordon-Levitt.
Menacé par un groupe de terroristes, il va tenter de faire atterrir l’appareil détourné en sauvant un maximum de passagers dont certains sont sauvagement assassinés par les attaquants. Le comédien séduit, le suspense s’amorce, mais ne dure malheureusement pas, le métrage ne tardant pas à se traîner pour virer dangereusement au ridicule. Et comme on sait, il tue.
Pour terminer, un petit mot de la compétition qui promet d’intéressantes découvertes. Mais on aura l’occasion d’en reparler.
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