Grand écran: "La Mule", road movie intime et mélancolique avec Clint Eastwood en passeur de drogue (24/01/2019)

screen-shot-2018-10-04-at-1-50-50-pm.pngAlors qu’il n’avait pas fait l’acteur depuis Une nouvelle chance en 2012, Clint Eastwood s’est repris au jeu dans La Mule. Passant donc derrière et devant la caméra, où il incarne un vétéran de la guerre de Corée qui s’est reconverti dans l’horticulture, une véritable passion. A près de 90 ans, Earl Stone n’en mène pourtant pas large. Non seulement il est brouillé avec son ex-femme et sa fille pour leur avoir de loin préféré les fleurs, mais il est fauché et sa petite entreprise risque d’être saisie.

Il accepte alors un boulot de chauffeur dont un invité aux fiançailles de sa petite-fille, la seule du clan familial à lui témoigner encore de l’affection, lui avait parlé. Il ne va pas toutefois pas rouler pour n’importe qui, puisque sans le savoir, du moins feint-il de l’ignorer au départ, il s’est engagé à servir de mule pour un cartel mexicain de la drogue.

Un papy insoupçonnable

C’est du gagnant gagnant. Pour les trafiquants il constitue l’atout majeur, son look de papy le rendant insoupçonnable et pour Earl, sorte de mascotte, le job se révèle des plus juteux, lui permettant se mettre à l’abri, de distribuer généreusement l’argent gagné à ses nombreux amis et à sa famille auprès de laquelle il veut se racheter.

Au fil de ses trajets, les cargaisons qu’il transporte soit de plus en plus importantes. Mais, comme la mule a une tête…de mule, ne respecte pas les consignes de prudence, s’arrête où il veut et brouille les pistes, il se voit imposer par les chefs narcos un homme de main pour le surveiller. Par ailleurs il va quand même avoir sur le dos Colin Bates (Bradley Cooper), un agent de la DEA (contrôle des drogues), qui met tout de même du temps à piger l’arnaque…

Ce road movie intime, à la fois joyeux et mélancolique sur fond de drame familial, de faux polar, de critique d’une Amérique laissant tout juste survivre ses anciens combattants, tient de l’œuvre testamentaire au ton crépusculaire dans la mesure où la mort rôde et où il faut faire vite. Il s’inspire de la vie de Leo Sharp, devenu dans les années 80 le transporteur de drogue le plus âgé et le plus rentable du Cartel de Sinalo.

D’un vétéran à l’autre

Il marque aussi la deuxième collaboration de Clint Eastwood avec le scénariste de Gran Torino Nick Schenk, dont le héros, Walt, également un vétéran, est un vieux réac raciste, amer, endurci, pétri de préjugés avant qu’il s’ouvre au contact d’adorables voisins.

Earl est son contraire, un homme charmant, sociable plein d’humour, d’autodérision. La marque d’un Clint Eastwood qui ne peut s’empêcher, clins d’œil aux étiquettes qui lui ont collé à la peau depuis L’inspecteur Harry, de se moquer dans le film d’un groupe de lesbiennes bikeuses et de donner un coup de main à un couple de «nègres» victime d’une crevaison.

La Mule, au scénario efficace en dépit de situations trop répétitives n’est pas notre préféré de l’auteur. Mais on est touché par cet homme émouvant et tendre en quête de rédemption, à qui le malicieux et charismatique Clint Eastwood chantant de la country en traçant la route, prête, à 88 ans, son physique sec, son visage buriné, ses yeux pétillants et son sourire irrésistible. A ses côtés, il retrouve pour la seconde fois Bradley Cooper, qui avait déjà joué dans American Sniper. Ainsi que sa propre fille Alison et sa petite fille Taïssa Farmiga.

A l’affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 23 janvier.

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