Grand écran: dans "L'atelier", Laurent Cantet donne à nouveau la parole aux jeunes (23/10/2017)

aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaatelier.jpgLaurent Cantet ne se lasse pas d’explorer la jeunesse française. Dans son dernier film, L'atelier, co-écrit avec son complice de 30 ans Robin Campillo, il reprend les codes d’Entre les murs (Palme d’or 2008) en réunissant une petite troupe multi-ethnique à la scolarité difficile. Durant un été à La Ciotat, elle suit un atelier d’écriture en vue de rédiger et de publier un roman noir. Il est dirigé par Olivia, une auteure connue.

Par le biais de l’art, ce travail vise à susciter le débat, permettant à chacun d’affirmer son identité et ses différences, surtout quand les participants entrent en conflit sur de grandes questions actuelles, terrorisme, radicalisation, chômage galopant, précarité, désindustrialisation à l’instar du chantier naval de La Ciotat fermé depuis 25 ans.

Bientôt pourtant, le film va se focaliser sur Antoine, garçon mutique et en retrait qui aime les armes, tenté par l’extrême-droite et les sensations fortes. Il va rapidement s’opposer au groupe et surtout à Olivia que sa violence inquiète, séduit, fascine.

S’engage alors dans ce film sous tension qui vire au thriller, un duel captivant entre le jeune homme et l’intellectuelle. Magnifiquement interprété par le débutant Mathieu Lucci et Marina Fois (photo), comme  d’ailleurs par tous les autres protagonistes. Excellent directeur d'acteurs, Laurent a en plus passé des mois sur le casting à la recherche de personnalités fortes.. 

"Comment avoir 20 ans dans une société aussi dure?"

Evoquant deux mondes qui se regardent, le réalisateur récemment de passage à Genève, explique avoir décidé, concernant Antoine, de créer un personnage assez inadmissible auquel cependant on s’attache. «Ce n’est pas un méchant mais un paumé qui va vers l’extrême-droite parce que cela pimente un peu sa vie. C’est une grenade dégoupillée avec un fort pouvoir de séduction et une grande intelligence, mais gaspillée».

«Il a dépassé le stade de pouvoir se prendre en main. Il y parviendra par la crise qu’il traverse avec Olivia, qui s’intéresse à lui parce qu’il lui fait peur, nonobstant une certaine attirance sexuelle et une envie de le sauver du pire. Par ailleurs, tout en servant de révélateur à Antoine, elle se remet elle aussi en question en tant que romancière».

Mais le plus important pour Laurent Cantet, au-delà de montrer la puissance de la parole permettant notamment à Antoine de mettre des mots sur son malaise, était de se demander comment avoir 20 ans dans un monde aussi dur socialement, où les jeunes enfermés dans des cases ne sont pas pris en compte, végètent dans de petits boulots avec peu de chance de se réaliser. Comment par ailleurs, vivre dans une société d’une violence aussi inédite. «J’ai commencé à écrire après Charlie et j’ai eu envie d’en rendre compte». 

A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 25 octobre.

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