Grand écran: "Rara", le défi de l'homoparentalité face à une société chilienne corsetée (30/08/2016)
Sara 13 ans et Catalina 9 ans vivent avec leur mère Paula et sa compagne Lia dans une chaleureuse ambiance féminine. Ce qui déplaît à leur père Victor, qui les prend pour le week-end et les vacances. Il s’est remarié mais n’apprécie pas cette promiscuité et souhaiterait que ses filles mènent une vie de famille «normale». Il considère en effet que l’éducation préconisée par les deux femmes et l’image que donne le couple sont nocives.
Son avis est partagé par son entourage, notamment une grand-mère trouvant qu’elles vont trop loin et traduisant son sentiment par un «Nous ne sommes pas à New York, mais à Vina del Mar… » Trop jeune pour avoir des préjugés, Catalina n’a apparemment que faire du regard des autres. Elle apprécie beaucoup sa vie entre ses deux mamans.
Ce n’est pas le cas de Sara. A l’aube de l’adolescence, elle aime les garçons, bien qu’elle les trouve plutôt bêtas. Un peu mal dans sa peau et dans son corps qui se transforme, elle se cherche en manifestant quelques velléités de rébellion.
Suite à une dispute futile, elle refuse de fêter son treizième anniversaire chez sa mère et quitte la maison pour aller chez son père. Qui en profite pour intenter un procès à son ex-femme dans l’espoir de récupérer la garde de ses enfants.
Adaptation d'une histoire vraie
Rara (Bizarre), premier film de la Chilienne Maria-José «Pepa» San Martin, journaliste, puis assistante réalisatrice après un passage au théâtre, est adapté d’un d’une histoire vraie. Il s’agit du cas de la juge Karen Atala, violemment discriminée en 2003 pour avoir fait son coming out. Avant de gagner son combat dix ans plus tard.
Dans ce film co-écrit avec la scénariste Alicia Sherson, Pepa San Martin élude heureusement les lourdeurs de la procédure juridique Pour les éviter, elle a choisi de raconter l’histoire d’un bout à l’autre du point de vue de Sara, optant pour un ton oscillant entre la légèreté, le sérieux, le drame, la drôlerie et l’émotion.
Par petites touches, sans dramatiser, la cinéaste s’inspire d’événements a priori sans importance, de remarques mal placées, d’un mot de trop, l’ensemble étant propice à autant de rebondissements et de surprises, jusqu’au dénouement plutôt inattendu…
Elle brosse ainsi un portrait intelligent, tout en subtilité et en finesse du quotidien de cette famille homoparentale victime de rejet au sein d’une société conservatrice. Une jolie réussite qui tient également beaucoup à ses interprètes. A commencer par Julia Lübbert, de tous les plans, étonnante de justesse, de pertinence et de naturel.
A l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 31 août.
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