Grand écran" "Trumbo" rappelle les heures sombres d'Hollywood, dans le viseur de McCarthy (27/04/2016)
En 1947, on est à l’aube de la Guerre froide entre les Etats-Unis et l’URSS. C’est aussi cette année-là que commence la chasse aux sorcières, à l’initiative du sénateur Joseph McCarthy.
Créée en 1938 pour enquêter sur la propagande nazie, la commission des activités antiaméricaines s’est reconvertie dans l’implacable traque aux communistes. Au plus fort de cette effrayante campagne, symbole de la plus grande intolérance, McCarthy s’attaque à Hollywood. Les auditions de stars se multiplient. Dix-neuf personnalités "suspectes" sont sommées de s’expliquer. Dix d’entre elles (on les appellera les "dix d’Hollywood") auront le courage de refuser de répondre ou de dénoncer, dont le célèbre scénariste Dalton Trumbo.
Emprisonné puis inscrit sur la Liste noire
Virulent et d’une rare audace en cette période dangereuse, il sera condamné à onze mois de prison puis inscrit, avec les neuf autres également reconnus coupables d’appartenir au Parti communiste, sur la Liste noire. Il leur est désormais impossible de travailler. Mais Trumbo ne baisse pas les bras bien au contraire. Aidé par sa famille et grâce à son talent, il contourne l’interdiction d’exercer..
Le réalisateur Jay Roach, étonnant car plus porté sur la grosse sinon grasse comédie, raconte son long combat dans l’ombre vers la réhabilitation. Il utilise une foule de pseudonymes, mettant sa femme et ses enfants à contribution pour faire passer sa copie.
Cigarette au bec, whisky à portée de main, il écrit tout le temps, particulièrement dans sa baignoire. Sa machine posée sur une planche, il va pondre une trentaine de scénarios au kilomètre pendant dix ans, du plus nul au meilleur, comme Vacances romaines en 1953 ou Les clameurs se sont tues en 1957 qui lui vaudront deux Oscars.
C’est Kirk Douglas, en poussant en 1960 Trumbo à écrire Spartacus, réalisé par Stanley Kubrick, sous son vrai nom qui le sort de la clandestinité. A l’issue de la projection, les félicitations du président Kennedy, qui en fera même son film préféré, mettront fin au cauchemar des "rouges" et à une décennie maudite,
Formidable prestations d'acteurs
Servi par une bonne reconstitution des années 50 et assorti d’images d’archives, le film séduit davantage par son ton caustique et son rythme que par sa mise en scène. Mais il vaut surtout pour cette terrible et fascinante page d’histoire, rappelant les heures très sombres d’Hollywood. Sans oublier les comédiens, à commencer bien sûr par le principal Bryan Cranston, nominé aux Oscars, mais coiffé par Leonardo DiCaprio.
Mêlant, élégance, cynisme et drôlerie, le héros de Breaking Bad redonne vie au moustachu Trumbo, personnage hors du commun, charismatique et intelligent, maniant l’humour comme une arme, tout en se révélant provoquant, attachant, combatif, irascible, tyrannique.
A ses côtés, on retiendra notamment Helen Mirren, excellente dans le rôle de la redoutable et perverse chroniqueuse Hedda Hopper, anticommuniste acharnée, soutien actif de McCarthy et Reagan, qui pouvait briser une carrière d’un trait de plume.
A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 27 avril.
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