Grand écran: Nanni Moretti séduit avec "Mia madre". Pudique, èmouvant, sans pathos (01/12/2015)
En plein tournage d’un film sur la fermeture d’une usine à laquelle s’opposent les ouvriers, Margherita, réalisatrice engagée, doit gérer une star américaine incapable de retenir ses répliques ou de les prononcer correctement, une fille en pleine crise d’adolescence et, bien plus grave, affronter la terrible réalité de la mort prochaine de sa mère. A laquelle elle rend visite à l’hôpital entre deux journées de plateau en compagnie de son frère toujours irréprochable et dont elle est un peu jalouse, ne se sentant pas à la hauteur.
Tout en traitant à nouveau du deuil, de la perte d’un être cher après La Chambre du fils qui lui avait valu la Palme d’or en 2001, Nanni Moretti parle, entre fiction et réalité, du cinéma en brossant le portrait d’une femme obsessionnelle, fragile, nerveuse, angoissée, en panne d’inspiration, trouvant que tout sonne faux dans sa manière d’aborder son nouveau long métrage censé prendre la défense des travailleurs. Une manière de s’interroger sur la pertinence actuelle de films militants dans une Italie où la conscience politique fait de plus en plus défaut.
La cinéaste en proie au doute à des questionnements existentiels et artistiques n’est autre que l’alter ego de Nanni Moretti, qui a cette fois préféré se mettre en retrait en jouant le frère dévoué et attentionné de son héroïne. Remarquablement interprétée par Margherita Buy. On est un peu moins fan de John Turturro , qui certes détend l’atmosphère, mais en fait des tonnes dans le rôle de la vedette fantasque, mégalomane et survitaminée tout juste débarquée des Etats-Unis.
Mais outre la performance des acteurs, ce qui séduit surtout c’est la pudeur, la simplicité, la sobriété avec lesquelles Moretti a empoigné son sujet. Sans pathos, le maestro italien déclare son amour à sa mère et au cinéma, tous deux confondus dans cette émouvante, belle et triste chronique d’une mort annoncée.
A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 2 décembre.
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