Festival de Locarno: lesbienne dans "La belle saison", Cécile de France fière de servir la cause gay (08/08/2015)
Instants de grâce sur la Piazza Grande avec La belle saison de Catherine Corsini, que portent magnifiquement Cécile de France et Izïa Higelin. Une histoire d’amour homosexuelle bouleversante, joyeuse, sombre et mélodramatique entre Delphine, une jeune paysanne de 23 ans rêvant d’avoir sa ferme et Carole, une Parisienne de 35 ans alors en couple avec un homme et très investie dans le combat féministe des seventies.
Cette plongée dans ces années permet notamment à la réalisatrice de rendre hommage aux femmes engagées à la tête de la lutte pour l’égalité et l’émancipation, souvent dénigrées, insultées, traitées de mal baisées ou autres grossièretés du genre. Nombre d’entre elles étaient homosexuelles, ont pu se faire entendre et contribuer ainsi largement à faire avancer les choses sur les problématiques à la fois politiques et intimes.
Catherine Corsini s’est documentée grâce à des interviews et en visionnant l’œuvre de la vidéaste suisse Carole Roussopoulos. Une pionnière, qu’’il s’agisse de filmer les luttes féministes ou le premier défilé homosexuel en marge du 1er Mai 1970. Elle était très amie avec Delphine Seyrig, avec qui elle a réalisé quelques métrages militants d’anthologie. C'est en hommage à ces deux femmes exceptionnelles que es héroïnes de La belle saison s'appellent Carole et Delphine.
Mais on aura l’occasion de reparler de cet opus très réussi qu’il s’agisse de la mise en scène, du traitement de la photographie et de l’excellent jeu des comédiennes lors de sa sortie en Suisse romande le 19 août.
En attendant, on a eu le bonheur de rencontrer la ravissante lumineuse et solaire Cécile de France, alias Carole, débarquée à Locarno en compagnie de sa réalisatrice. La comédienne qui dit choisir ses rôles avec le cœur, avoue n’avoir pas été partante au départ.
"J‘avais déjà joué une lesbienne dans cinq films et je souhaitais garder la liberté de la diversité. Catherine était très triste. Mais en lisant le scénario, j’ai adoré cette histoire qui m’a aussi beaucoup émue et j’ai finalement dit oui".
Vous vous dites fière d’être la "lesbienne du cinéma français", le porte-drapeau en quelque sorte de la cause gay, tout en craignant d’être enfermée dans le rôle.
En effet. Pour les réalisateurs, je veux rester une page blanche, mais pour le public c’est autre chose. Si cela peut aider les gens à assumer leur différence, tant mieux.
Etes-vous une militante?
Si vous entendez par là descendre dans la rue pour manifester et faire bouger les lignes, non. Je ne suis que comédienne. Mais je m’engage à mettre toute mon énergie dans les films. Et surtout je dis merci à celles qui se sont tant battues pour sortir les femmes de leur enfermement social
Quand vous avez décidé d’accepter la proposition de Catherine Corsini, saviez-vous qui serait votre partenaire? Et aviez-vous des préférences?
Je l’ignorais et ce n’était pas à moi de décider. Mais Catherine Corsini me faisait part de ses doutes quant au choix de la fille en question et me faisait participer.
Vous avez pas mal de scènes de nu. Etait-ce un problème pour vous? Et comment cela s’est-il passé entre vous et Izïa Higelin
En ce qui concerne la première partie de la question, je n’étais pas gênée dans la mesure où les scènes d’amour ont été tournées avec beaucoup de délicatesse, de pudeur. J’avais presque l’impression de faire partie d’une œuvre d’art, de poser pour un peintre. Et avec Izïa, c’était comme dans les douches de filles, Plutôt décontracté.
Est-ce pareil d’être filmée par une femme ou un homme pour ce genre de rôle?
Pas vraiment en l’occurrence car "La belle saison" est basé sur la vie de Catherine Corsini, elle-même homosexuelle. Ce qui en fait une œuvre sincère et pleine d’amour. Mais sinon quand je suis concentrée dans l’action, je ne pense pas spécialement à la personne derrière la caméra.
Vous parliez de page blanche par rapport ä un cinéaste. Mais y a-t-il des personnages que vous aimeriez particulièrement interpréter ?
Je n’aime pas penser comme ça. Je ne me dis pas ah, j’aimerais trop travailler avec David Lynch. J’ai des projets, de belles propositions. Et notamment une fiction, The Young Pope avec Ludivine Sagnier et Jude Law qui se déroulera sur huit épisodes (Réd : elle est réalisés par l’Italien Paolo Sorrentino, récemment oscarisé pour La Grande Bellezza et qui était de retour à Cannes en mai dernier avec Youth.
Dites-nous encore deux mots sur votre expérience avec Clint Eastwood? Etait-ce différent de tourner en France ou aux Etats-Unis ?
La différence c’est Eastwood. Il a une manière de travailler qui n’est pas liée à sa nationalité. Avec lui tout va très vite, il ne fait qu’une prise, il délègue beaucoup. Il est détendu, zen, se révèle très détendu, zen, gentil. En d’autres termes aussi génial qu’on l‘imagine.
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