Cinéma: le grand retour d'une magnifique Clotilde Courau dans "L'ombre des femmes" (05/06/2015)

OMB0003[2].jpgAprès son mariage en 2003 avec le prince Emmanuel-Philibert de Savoie, Clotilde Courau squattait  davantage les pages people que le haut de l’affiche. La voici enfin, magnifique et émouvante, de retour dans un grand rôle chez Philippe Garrel. Qui, avec L’ombre des femmes, signe une petite perle en noir et blanc de 73 minutes.

Ce drame sur un couple à l’épreuve de l l’infidélité présenté en ouverture de la Quinzaine des réalisateurs au dernier Festival de Cannes, revisite avec cruauté, tendresse et malice le trio ou plutôt le quatuor amoureux, en montrant que le désir est aussi puissant chez la femme que chez l’homme. (Lire  notre critique du 3 juin dernier) 

Beaucoup d’actrices avouent qu’elles feraient n’importe quoi, réciter le bottin par exemple, pour jouer sous la direction de Jean-Luc Godard ou Woody Allen. Philippe Garrel fait cet effet-là à Clotilde Courau. "On lui dit oui sans hésiter. L’aventure dans son univers ne se refuse pas. C’était une rencontre exceptionnelle",  confie-t-elle lors d‘une interview réalisée à Genève.

-Comment avez-vous débarqué dans son film ?

-Grâce à Louis qui m’a présentée à son père. Philippe m’a d’abord demandé de lire le scénario, puis d'effectuer une seconde lecture avec Stanislas Merhar pour voir si notre couple était crédible.

-Qu’est-ce qui vous fascine tant chez cet homme ?

-Sa liberté, ses interrogations sur l'amour, sur les rapports entre l’homme et la femme.

-Et chez Manon, le personnage principal qui vous était réservé ?

-Ce n'est pas tellement Manon qui m'a séduite, mais surtout le fait d’être avec un cinéaste qui parle de son sujet d’une façon aussi profonde et épurée. Son enquête minutieuse du sentiment amoureux m’a beaucoup plu. En réalité, pour moi il n’y a pas de rôle, mais un metteur en scène qui filme des personnages dans l’histoire qu’il raconte. C’est un chef d’orchestre, tandis que le scénario représente une partition. Et le comédien se glisse à l’intérieur.

-Quelle est sa manière de travailler ?

-Une condition sine qua non, être disponible une fois par semaine et répéter pendant 14 semaines. Dès qu’on tourne, il n'y a qu'une prise. Il filme dans la chronologie et le montage s’effectue au fur et à mesure.

-Vous êtes excellente dans "L’ombre des femmes". Une virtuose dit même son auteur. Une réaction à ce compliment particulièrement flatteur?

-Je ferme les yeux et les oreilles. Evidemment cette appréciation me touche infiniment. En même temps, comme je suis très exigeante, je n’ai pas fini d’apprendre.

-Vous voir chez un tel cinéaste peut paraître étonnant après ce qui s’apparente à une traversée du désert. En avez-vous souffert ?

-C’était une période difficile mais également nécessaire et merveilleuse. Elle m’a permis de me remettre en question, de savoir ce qui était fondamental pour moi, de construire une famille et des amitiés profondes. Comme j’ai eu du temps, j’ai pu vraiment m’enrichir, approfondir ma cinéphilie, découvrir chez qui j’avais envie d’aller. Haneke, Cavalier, Godard. Ou encore le Danois Joachim Trier, dont j’ai trouvé Louder Than Bombs (réd: en compétition à Cannes) formidable.

-Et si cela n’arrive pas?

-Vous venez de parler de ma traversée du désert.  Eh bien aujourd’hui, je n’ai pas peur d’attendre.  Comme on dit, ce qui ne vous te pas vous rend plus fort...

"L'ombre des femmes" est à l'affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 3 juin. 

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