Cinéma: Fernand Melgar s'immerge chez les SDF dans "L'Abri". Fort et dérangeant (09/09/2014)
Après La Forteresse et Vol Spécial, le cinéaste vaudois Fernand Melgar "la mauvaise conscience de la Suisse", nous plonge au cœur de L’Abri, un centre d’hébergement d’urgence pour SDF à Lausanne.
Il boucle ainsi en principe sa trilogie sur la migration. Le premier parle d’arrivée en Suisse, le second évoque la fin du voyage. Le troisième est une sorte de no man’s land, un entre-deux entre l’arrivée et le départ.
Avec ce volet qui peut en appeler un quatrième ("ce sont les films qui me choisissent"), Fernand Melgar et Elise Schubs, sa preneuse de son, nous emmènent dans un souterrain jusqu’à la porte du centre. C’est l’hiver, le froid mord, il neige. Chaque soir se déroule le même rituel d'entrée dramatique, qui provoque des bousculades parfois violentes.
Trois veilleurs ont la terrible tâche de trier les démunis, laissant pénétrer d’abord les personnes âgées, les handicapés, les femmes et les enfants, puis les hommes. Alors que la capacité est de 100 places, seuls 50 seront admis et auront droit à un repas et à un lit. Pour les autres, la nuit sera dure.
Dans L'Abri, on trouve en majorité des citoyens de l’Est et du Sud de l’Europe. Ce ne sont pas des clandestins, ils ont des papiers, des passeports et fuient la crise. Ce sont des migrants économiques, des working poors avec enfants à charge touchant des salaires de misère, des êtres humains qui cherchent désespérément à s’en sortir".
La technique de Melgar, c’est l’immersion totale. Pendant six mois, lui et Elise Schubs ont vécu au milieu des sans-logis, attendant avec eux à l’extérieuret pénétrant aussi à l’intérieur du centre. Le reproche qu’on peut adresser au réalisateur revendiquant un cinéma de "l’intranquillité", c’est de ne pas porter de jugement.
En même temps, il ne faut pas être grand clerc pour voir où vont ses sympathies dans ce documentaire fort, dérangeant, bouleversant racontant ce lieu où les barrières représentent la loi et l’autorité et qui a posé d’énormes problèmes moraux à son auteur. Il tente de faire réfléchir les gens et les questionne après le vote du 9 février qui a conduit à la fermeture des portes.
"Pour moi le fondement de la société moderne c’est le respect des droits humains. Or c’est le contraire dans ce film. Aujourd’hui on glisse vers l’exclusion. Alors j’ouvre des fenêtres". (Voir l’entier du texte dans la note du 10/8/2014)
Film à l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 10 septembre.
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