Festival de Cannes: Godard et son "Adieu au langage", de la 3D décoiffante (22/05/2014)
Très fort Godard. Le seul qui réussisse à faire poireauter les gens dans une queue interminable pendant plus d’une heure et demie pour un film qui dure 70 minutes. A l‘occasion de son retour en compétition treize ans après L’éloge de l’amour, le réalisateur culte de 83 ans, qui n’a fait pas le voyage sur la Croisette, proposait Adieu au langage.
Un opus farfelu, inclassable, sinon un objet cinématographique non identifié, où se succèdent dans une sorte de frénésie des scènes saugrenues, parfois brusquement coupées, et où se multiplient maximes ou citations .
Dans une interview à France Inter, le cinéaste s’est expliqué sur la signification de son titre Adieu au langage, dont il est parti pour tourner son film. "En gros, c’est un adieu à ce que les gens appellent le langage qui ne l’est pas. On pourrait dire aujourd’hui de la conversation, du talk show, du dialogue personnel entre les gens. Le langage vient de plus loin, c’est une alliance entre la parole et l’image que l’enfant qui naît connaît un bref moment car il est à la fois ébloui et il crie. Puis vient la communication, qui n’a aucun rapport sérieux avec le langage…"
Oui mais encore... On croit alors être aidé par le dossier de presse où Godard nous dit que le propos est simple. Une femme mariée et un homme libre se rencontrent ils s’aiment se disputent, les coups pleuvent un chien erre entre ville et campagne les saisons passent l’homme et la femme se retrouvent…
A l’écran, on voit un couple nu philosopher, un bateau sillonner le "lac de Genève" (pour agacer les Vaudois et autres riverains?), des extraits de vieux films hollywoodiens en noir et blanc et souvent un chien qui fait le chien en battant de la queue. C’est Roxy, le toutou du maestro, qui vous aime plus qu’il ne s’aime lui-même et nous regarde de ses yeux noisette. Lui ne communique pas, il communie.
Tout et n'importe quoi. Ou pas...
Tandis que s’inscrivent en alternance les chapitres 1 et 2 soit la nature et la métaphore, les aphorismes foisonnent en voix off. "Ceux qui manquent d’imagination se réfugient dans la réalité". "Bientôt on aura besoin d’un interprète pour comprendre les mots qui sortent de votre propre bouche". "Une femme ne peut pas faire de mal, elle peut gêner, elle peut tuer, c’est tout". "La société est-elle prête à accepter le meurtre pour limiter le chômage?" "La pensée retrouve sa force dans le caca".
Tout et n'importe quoi en somme. Ou pas... Le mieux est encore de regarder. Et là, on en a plein les yeux. On est littéralement scotché au fauteuil par l‘utilisation étonnante et géniale que le réalisateur fait de la 3D. Dans son entretien à France Inter, Jean-Luc Godard expliquait que la 3 D est juste quelque chose qui vous fait croire que vous pouvez voir une surface plate en relief. Mais quelle vision extraordinaire!
13:02 | Lien permanent