Cinéma: Avec "Nyphomaniac", Lars Von Trier met Charlotte Gainsbourg sur le divan... (28/01/2014)

1389279275079_0570x0367_1389279305170[1].pngLe plus souvent au cinéma, le cul attire autant qu’il déçoit. Mais voilà qui n’était pas pour décourager Lars Von Trier, bien au contraire. Après avoir commencé, dans un premier volume, par retracer le parcours érotique d’une nymphomane autoproclamée de sa naissance à la cinquantaine, le provocant Danois propose la suite de son odyssée sexuelle.  

Petit rappel. Lors d’une froide soirée d’hiver, Seligman, un vieux et charmant célibataire endurci, découvre Joe dans une ruelle. A demi-consciente, elle a été méchamment passée à tabac. Seligman la ramène chez lui, la soigne et Joe se confesse à lui, racontant sa quête ardue sinon impossible de jouissance à travers diverses expériences qui en feront une sexual addict.

Et cela au fil de cinq chapitres se voulant sulfureusement subversifs et de quelques parties labellisées pornos pour titiller le spectateur. Au final, un film à prétention littéraire contrastant avec un vide métaphysico-spirituel, où Lars  Von Trier joue au psy un rien pervers. Histoire de se maintenir à hauteur de sa vénéneuse réputation.

Il s’ensuit un curieux dialogue. Par exemple la stratégie de la séduction s’apparente à la pêche à la mouche, passion à laquelle s’adonne Seligman,  son sauveur  philosophe. Une démonstration plombante à la longue, ne menant pas à grand-chose à part distiller un certain ennui et à nous dire que le sexe est aussi triste que coupable.

Le  constat ne change pas fondamentalement dans le second volume et la suite des confidences, toujours délivrées sur le ton doucereux et envoûtant de notre nympho (mytho ?) maniaque à la recherche frénétique du plaisir. On y voit Jerôme pousser Joe à se lancer dans des aventures extraconjugales pour tenter d’assurer la durée de leur couple. Car vivre avec une nymphomane exige de la ressource. Elle est même comparée à un tigre qu’il faut savoir nourrir. 

nymphomaniac[1].jpgEt Joe, devenue mère entretemps, d’en profiter pour tenter d’éteindre son inextinguible soif de sexe, négligeant ainsi évidemment son enfant. Un prétexte pour le réalisateur, outre de culpabiliser son héroïne, de nous la montrer dans d'interminrvles et complaisantes séquences sado-masos, ou en compagnie de deux Noirs dans une sorte de grotesque farce théâtrale...

Avec à la clé la remarque selon laquelle une femme qui dit ne pas avoir envie de coucher avec un Noir ment. Sans oublier l’évocation douteuse sur le mérite, voire la souffrance de pédophiles qui ne passent pas à l’acte. On notera en revanche un étrange plaidoyer féministe vers la fin. Encore qu’avec le misogyne Lars Von Trier on ne sache pas vraiment si c’est du lard ou du cochon…

En dépit de ses aspects lourdingues et caricaturaux, d’un dénouement improbable quoiqu’un peu attendu, tout n’est pas à jeter dans cet opus où le cinéaste mêle le beau et le sordide, la noirceur et la solitude, l’angoisse et la branlette, l’intime et le transgressif. Le tout sur fond d’amour inassouvi et d'envie de rédemption.  

Dans ce (très) long-métrage en deux parties, amputé de plus d'une heure que seuls les festivaliers verront à Berlin, on a l’impression que l’auteur s’invite pour prouver des choses ou régler des comptes. Notamment lorsqu’il insiste sur les origines juives de Seligman le confesseur, sur la différence entre l’antisémitisme et l’antisionisme (on se rappelle sa sortie sur Hitler à Cannes), ou quand il pousse Joe à donner son avis  sur le mot  "nègre".

Reste le casting, qui emporte une certaine adhésion à l'ensemble. Aux côtés de la troublante et fragile Charlotte Gainsbourg , victime fascinante qui séduit par son charme magnétique, on trouve  Stellan Skarsgard en vieux célibataire apparemment  asexué, ainsi que la talentueuse Stacy Martin en  Joe  jeune  formant couple avec Shia Laboeuf. A souligner que ce dernier avait tellement envie d’en être qu’il avait envoyé une sextape au cinéaste pour décrocher un rôle.

Film à l’affiche dans les salles de Suisse romande dès  mercredi 29 janvier.  

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