Le Léopard d'Or à "La fille de nulle part", de Brisseau. Consternant... (12/08/2012)

teaserbreit[1].jpgJe ne le répèterai jamais assez, surtout ne pas faire de pronostics au festival de Locarno! Du moins en ce qui me concerne. Difficile en effet de tomber plus mal que lors de ce cru 2012. Tant pis, c’est le jeu. Ecartant donc pratiquement toutes mes suggestions, le jury officiel présidé par le Thaïlandais Apichatpong Weerasethakul a primé La fille de nulle part de Jean-Claude Brisseau.

Un choix proprement sidérant. Pour ne pas dire atterrant. Mais pleinement assumé par des jurés en totale symbiose, si l’on en croit notamment la cinéaste française Noémie Lvovsky. En résumé, " il s’agit d’ un film tellement spécial, qui parle de cinéma, de son histoire… Ce n’est pas un film réalisé par un metteur en scène âgé, mais par un homme incroyablement jeune d’esprit qui nous montre son absolu besoin de faire…  Brisseau est le plus jeune de la nouvelle nouvelle vague".

A l’évidence, ce Léopard d’Or récompense un auteur qui eut de la grandeur. Car l’ennui, c’est qu’on ne voit pas franchement à l’écran ce qui a provoqué un tel enthousiasme pour cet opus qui se veut fantastique. Enfin, sauf si le nec plus ultra consiste à tourner, avec des bouts de ficelle, un film dans son appartement, lieu dévolu à quelques références cinématographiques. Et devenu, entre deux intermèdes dissertatoires fumeux ou une scène saphique, le théâtre de phénomènes mystérieux après que le héros (en l’occurrence Brisseau lui-même), eut recueilli une jeune femme ensanglantée sur le pas de sa porte…

Les autres prix

Surprise également avec le prix spécial du jury à Somebody Up Likes Me, de l’Américain Bob Byington. Plus compréhensible, sinon très justifié voilà qui rassure, celui de la mise en scène décerné au Chinois Laing Ying pour When Night Falls, qui raconte une histoire vraie. Celle d’un meurtrier de six agents de Shangaï, après avoir été violemment molesté par la police pour avoir roulé sur un vélo non homologué. Sa tête d’affiche An Nai a par ailleurs été sacrée meilleure actrice.

De son côté Le comédien Walter Saabel a décroché l’interprétation masculine pour son rôle dans  Der Glanz des Tages de Tizza Covi et Rainer Frimmel, seul et unique opus cité dans mes papables. A signaler encore une mention spéciale du jury pour le Portugais A Utima Vez Que Vi Macau. 

En revanche Leviathan, puissant documentaire décrivant le formidable affrontement entre l’homme et la mer et son bateau n’a plu qu’au jury composé de critiques, tiens donc… Et parmi ceux que j’ai relevés, trois (Starlet, Mobile Home et Compliance) ont été distingués par le jury des jeunes. C’est déjà ça! Le public a lui curieusement aimé le laborieux Lore de Cate Shortland, tandis que le Variety Piazza Grande Award a décompensé Camille redouble de Noémie Lvovsky.

Glamour et rétro de maître, des arbres qui cachent la forêt 

Si le Léopard d’Or illustre la faiblesse de la compétition, force est de constater que côté Piazza Grande, ce n’est pas mieux. A l’exception de quelques opus comme Quelques heures de printemps,  Ruby Sparks, ou évidemment Bonjour tristesse, on s'est même trouvé face à la pire édition depuis longtemps.

Une chose est sûre, le directeur artistique du festival, Olivier Père, ne pourra pas éternellement se réfugier derrière le glamour d’une pléiade de stars comme les Delon, Bernal, Carax, Belafonte, Muti et autres Rampling pour masquer cette évidence. Ni derrière une rétrospective consacrée à un maître du septième art, en l’occurrence donc le génial Otto Preminger. Même s’il est vrai qu’il justifiait à lui seul le déplacement au Tessin. Ne manquez surtout pas son oeuvre, prochainement programmée à la Cinémathèque.

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