Festival de Locarno: Alain Delon assure le show (03/08/2012)
Après Charlotte Rampling, c’est Alain Delon, ovationné la veille sur la scène de la Piazza grande où il a reçu un Léopard d’honneur pour l’ensemble de sa carrière, qui est venu à la rencontre de la presse et du public. Mitraillé par les photographes, assurant le show, le célébre comédien français a évidemment largement contribué au glamour de Locarno, pour la plus grande joie de son directeur artistique, Olivier Père.
Mentionnant un début de vie assez tragique, un départ à l’armée très tôt, "la fierté du festival" rappelle qu’il n’avait aucun désir de se lancer dans le cinéma. Jusqu’à ce qu’il voie Deburau, un film de Sacha Guitry datant de 1951, en ressorte bouleversé et décide d’en faire son métier. Et puis, miraculeusement,le cinéma est venu le chercher. « A cause de mon physique d’abord, mais aussi ensuite pour ce que j’avais à l’intérieur ».
Souriant, décontracté et plein d’humour, contrairement à sa réputation d’homme tyrannique, colérique et mégalomane, Alain Delon, truand du remarque: "Je ne suis pas un acteur difficile. Avec les grands je marche au doigt et à l’œil. En revanche, avec les imbéciles qui ne savent pas ce qu’ils veulent, je peux effectivement être terrible".
Et dans les grands, il y naturellement René Clément, son maître, avec qui il a tourné Plein Soleil en 1959, un premier chef d’oeuvre en forme de déclic pour la suite de sa carrière. "C’est après avoir vu ce film que Luchino Visconti est venu me chercher.Je veux ce garçon pour Rocco, a-t-il exigé. Dans son panthéon, on trouve également Jean-Pierre Melville, notamment auteur du Samourai, autre sublime performance d’Alain Delon.
Pour le comédien qui se compare à un premier violon dans l’orchestre, ces hommes sont des artistes, à l’égal d’un chef comme Karajan. "Ils possèdent trois qualités essentielles. Ils vous mettent en scène, vous dirigent puis passent derrière la caméra et deviennent les réalisateurs. Aujourd’hui, la majorité des cinéastes en ont une de ces caractéristiques, parfois deux, mais rarement trois.
C’est ainsi que pour lui, le cinéma est mort au siècle passé. "J’ai fait un cinéma qui faisait rêver. Aujourd’hui ce n’est plus le cas". Avouant toutefois qu’il serait prêt à tout faire pour autant que le rôle soit bon. Relevant aussi qu’un film l’a surpris. C’est Intouchables. J’aurais beaucoup aimé jouer le rôle de François Cluzet".
Encore que le fauteuil roulant soit la chose qu’il redoute le plus. "Je ne crains pas la vieillesse, mais l’infirmité, l’impotence. Je pense que je me dois tellement à mon public que je ne me montrerai jamais diminué à lui. Ce ne serait pas digne".
Alain Delon évoque encore son passage aux Etats-Unis. "On m’avait dit reste, tu deviendras une grande star. Mais la France et Paris m’auraient manqué. Le cinéma oui, la caméra étant pareille partout, mais l’Amérique non".
En revanche, il ne tarit pas d’éloges sur les comédiens d’outre-Atlantique. Jouer avec Burt Lancaster, c’était comme donner la réplique à Jean Gabin. Et si j’avais pu, je me serais contenté de servir le petit-déjeuner à Marlon Brando. Pour moi, c’est "the" movie. Il avait même une fois déclaré qu'il serait décédé cliniquement le jour où Brando opartirait...
Enfin, un journaliste chinois lui assurant qu'il est un dieu dans son pays, Alain Delon ne comprend effectivement pas qu’on ne lui ait jamais proposé d’aller jouer là-bas. "J’étais à Shangaï et j’avais du mal à marcher dans la rue tant j’étais sollicité". Sans oublier une anecdote à propos de Johnnie To, un cinéaste avec qui il aimerait travailler. "Il donnait une conférence dans un hôtel. Je suis passé, Johnnie est venu vers moi s'est agenouillé et m'a baisé la main".
Très applaudi, Alain Delon termine son petit show par une boutadeil à propos de la grandeur de Locarno, à laquelle il contribue par sa présence: "Pourquoi avez-vous attendu 50 ans pour m’inviter?"
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