Festival de Cannes: baptême réussi pour le Genevois Nicolas Wadimoff (23/05/2012)

aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaanic.jpgUne salle bien remplie, un public très réceptif et des applaudissements nourris. Pas mal pour une première sur la Croisette. De quoi calmer les nerfs de Nicolas Wadimoff, en permanence tiraillé entre l’excitation et l’anxiété depuis son arroivée. "Cela me fait un gros effet d’être là et chaque pas me rappelle l’importance de Cannes. Je mesure le pouvoir fantasmatique de ce festival, alors que je ne suis jamais posé la question à Berlin ou à Venise".

Issu du cinéma politique, qui est resté son fonds de commerce, le réalisateur est venu présenter Opération Libertad à la Quinzaine des Réalisateurs, la plus prestigieuse des sections parallèles du festival. Il propose une fiction dont l’intrigue se déroule d’octobre 1977 à avril 1978, entre les assassinats du patron des patrons allemands Hanns -Martin Schleyer par la Rote Armee Fraktion et du politicien italien Aldo Moro par les Brigades rouges .

Son histoire, aussi  intéressante qu’ édifiante s’inspire de faits réels. En compagnie de son co-scénariste Jacob Berger, Wadimoff s’est livré à de nombreuses recherches, notamment iconographiques, et a rencontré des révolutionnaires qui militaient en Suisses dans ces années-là. Un travail de deux ans, complété par l’écriture et les répétitions en amont pour s’imprégner au mieux de la période.

Le cinéaste raconte ainsi l’attaque fictive d’une grande banque zurichoise par un groupe d'activistes, pour s’emparer des millions de dollars d’une dictature sud-américaine sanguinaire, blanchis par l’établissement.  

L’intégralité de l’opération est filmée et des cassettes en témoignant réapparaissent trente ans plus tard. C’est le seul moyen de faire connaître la chose, car rien n’avait filtré dans les médias, à la grande frustration de ses auteurs.

A noter que la réalité a rattrapé la fiction, un avocat paraguayen ayant entamé des procédures pour exiger la restitution de 5 milliards placés par le régime de Stroessner sur des comptes secrets. 

Un prétexte à se poser plusieurs questions

Grâce à des reconstitutions détaillées et un énorme boulot sur l’image pour qu’elle ait la texture idoine, l’opus donne l’illusion d’avoir été réellement tourné à l’époque. Il est prétexte à s’interroger sur les motivations des protagonistes, qui ne sont pas des héros romanesques à tendance psychopathe comme souvent dans ce genre de film, à se demander jusqu’où on peut aller, avec quels moyens, pour quelle fin et quel est le prix à payer. 

"Dans ce faux documentaire devenu une comédie dramatique si j’en juge par les réactions des spectateurs, je veux d’abord parler d’action directe et d’engagement politique", confie Nicolas Wadimoff.

Il montre aussi que tout est soluble dans le système helvétique, plus sophistiqué que celui des activistes.  "La Suisse digère tout, de la question des fonds juifs aux scandales de l’UBS en passant évidemment par les agissements d’un groupuscule terroriste. On se trouve face à un roc  imperméable aux soubresauts de l’Histoire. Je suis persuadé de la pérennité absolue du label. C’est à la fois fascinant et effrayant".

"Opération  Libertad" sera à l’affiche dès le 30 mai à Genève.

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