Festival de Cannes: une quinqua dodue prise au piège du tourisme sexuel (18/05/2012)
Cougars occidentales défraîchies et flasques, elles tentent d’oublier leurs rides et leurs bourrelets dans les bras musclés d’éphèbes kényans. Mais l’illusion du bonheur se paie au prix fort.
Le provoquant cinéaste autrichien Ulrich Seidl ne s’embarrasse pas de circonvolutions politiquement correctes pour souligner le triste état de nos sociétés. Adepte de la radicalité, il s’attaque frontalement aux sujets les plus scabreux.
Après Dog Days montré à la Semaine de la critique en 2002 et Import/Export présenté en concours en 2007, l’auteur s’aligne à nouveau en compétition avec Amour, le premier volet d’une trilogie cyniquement intitulée Paradis, dans laquelle trois personnages féminins de tous âges tentent vainement de s’extraire de leur condition.
L'opus initial voit des Autrichiennes vieillissantes sans scrupule, avides de "renifler la peau d’un nègre et admirant leurs belles dents", se transformer en sugar mamas qui entretiennent des beachboys kényans pour leur plaisir. Ulrich Seidl suit plus particulièrement Teresa (photo), une quinquagénaire aux chairs tombantes.
L'exotisme ravageur du lieu la poussant à imaginer un prince charmant jeune et costaud, elle se laisse prendre au piège du tourisme sexuel. Plus naïve qu’une adolescente amoureuse, elle finit par croire aux déclarations enflammées de Gabriel beau comme un Dieu, qui n’en veut évidemment qu’à son argent, comme tous ses congénères. Avant de partir à l’assaut d’une nouvelle proie facile.
En quête d’esclave sexuel, l’exploiteuse devient l’exploitée. Le paradis se mue en enfer et l’illusion de bonheur des premiers jours se transforme en une rage et une souffrance à la hauteur de l’humiliation subie.
Entre documentaire et fiction, Ulrich Seidel ne recule devant rien, traitant sans concession de la misère sexuelle et affective. Dans une mise en scène froide excluant toute émotion, il balaye les tabous, qu’il s’agisse de la libido marchande du Noir pauvre et lubrique, ou celle de la Blanche sur le retour dont il met impitoyablement le corps lourd et gras à nu.
A l'image de celui de la comédienne Margarethe Tiesel, qui se livre elle aussi sans limite, avec un naturel confondant, à la caméra crue et dérangeante du réalisateur. A noter que les protagonistes masculins sont de vrais beachboys. A commencer par Gabriel, le bourreau des cœurs du coin qui se vante, paraît-il, d’avoir tombé trois sugar mamas.
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